LA FORMATION DE BULLES DE GAZ DE FISSION DANS LE COMBUSTIBLE OXYDE

LA FORMATION DE BULLES DE GAZ DE FISSION
DANS LE COMBUSTIBLE OXYDE

Le fonctionnement d’un Réacteur à Eau Pressurisée (REP)

Un réacteur nucléaire permet de produire une réaction de fission en chaîne et d’en contrôler l’intensité. Quatre constituants principaux sont nécessaires :  un combustible dans lequel se produit la fission et qui est, dans le cas des REP, du dioxyde d’uranium ou de l’oxyde mixte uranium-plutonium (MOX) ;  un fluide caloporteur (eau), qui transporte la chaleur hors du cœur du réacteur pour ensuite actionner une turbine (turboalternateur) permettant la production d’électricité ;  un modérateur (eau) qui permet de ralentir les neutrons afin de favoriser la réaction en chaîne ;  un moyen de contrôle de la réaction en chaîne. Il en existe trois types principaux : – des poisons neutroniques solides ajoutés à l’UO2, comme le gadolinium ; – des barres de commande constituées de matériaux absorbant les neutrons (AIC, B4C) que l’on fait plus ou moins rentrer dans le cœur du réacteur ; – des corps dissous dans l’eau dont on peut faire varier la concentration au cours du temps (par exemple du bore sous forme d’acide borique).L’énergie libérée par les fissions dans le combustible est récupérée sous forme de chaleur, dans le cœur du réacteur. L’eau sous pression, qui joue le rôle de caloporteur, évacue cette chaleur à travers le circuit primaire vers les générateurs de vapeur (échangeurs), puis vers les turbines via un circuit secondaire. Les alternateurs couplés aux turbines produisent finalement l’électricité.

Le combustible d’un REP 

Dans les REP, le combustible est soit le dioxyde d’uranium, soit l’oxyde mixte MOX (pour Mixed Oxides) (U,Pu)O2. Les pastilles d’UO2 sont élaborées par métallurgie des poudres à partir d’une poudre d’oxyde d’uranium enrichi. La poudre a une surface spécifique d’environ 2 m2 .g -1 , suffisamment basse pour lui conférer une excellente stabilité (peu d’évolution dans le temps du rapport O/U), et assez élevée pour lui conférer une bonne frittabilité [2]. La structure cristallographique de l’UO2 stoechiométrique est de type fluorite, de groupe d’espace Fm3m, (Figure 2).La maille élémentaire d’UO2 est une maille cubique face centrée d’uranium dans laquelle quatre atomes d’oxygène occupent les sites tétraédriques. Les liaisons atomiques entre les atomes d’uranium U et d’oxygène O sont de natures partiellement covalentes et partiellement ioniques. D’après le critère d’ionicité basé sur la différence entre l’électronégativité des deux atomes (  O = 3,5 et  U = 1,5) [4], cette liaison serait plus précisément à 63 % ionique. Pour l’UO2 stoechiométrique, le paramètre de maille est de 5,470±0,001 [5] à température ambiante et sa température de fusion de 2847±30 °C [6]. Les pastilles de combustible MOX, dans le cadre du recyclage du plutonium récupéré au retraitement des pastilles UO2 irradiées, sont constituées d’un mélange de dioxyde d’uranium et de dioxyde de plutonium (PuO2) jusqu’à des teneurs moyennes en plutonium (pastille) de 12 % en masse. Ce combustible se nomme le combustible MOX (acronyme anglais : Mixed OXyde). Le  plutonium, dans ce type de combustible, provient du retraitement des pastilles UO2, irradiées 3 à 4 cycles. Pour comprendre l’origine de ce plutonium (élément artificiel), il faut savoir que les pastilles de dioxyde d’uranium irradiées sont constituées en majorité par l’isotope 92U 238 qui est fertile. Ainsi sous irradiation, par capture neutronique dans le domaine épithermique et décroissance −, cet isotope de l’uranium se transforme en 94Pu 239 , élément qui est fissile et donc source d’énergie nucléaire comme l’isotope 92U 235 . Ainsi, au terme des quatre cycles d’irradiation, dans les pastilles de dioxyde d’uranium, l’isotope 92U 235 a été consommé en quasi-totalité, tandis que le 94Pu 239 formé n’a été que partiellement consommé. Il est donc intéressant de retraiter ces pastilles de dioxyde d’uranium pour récupérer cet isotope du plutonium. D’autres isotopes du plutonium, créés sous irradiation, sont également intéressants, comme l’isotope 94Pu 241 (isotope également fissile dans un REP). Dans les deux cas (UO2 et MOX), la poudre est pressée sous forme de pastilles. Les pastilles sont frittées (diamètre ~ 8,2 mm, hauteur ~ 13 mm : cf. Figure 3), avec un évidement hémisphérique à chaque extrémité, destiné à compenser l’excès de dilatation du centre de la pastille par rapport à la périphérie, sous irradiation. On vise, pour les pastilles, une densité de 95 % de la densité théorique ; il faut, en effet, une valeur élevée pour garantir une bonne stabilité de la pastille (faible redensification en réacteur), mais on veut également garder quelques pourcents de porosité pour accommoder une partie du gonflement de la pastille sous irradiation. Les pastilles crues sont généralement frittées pendant 4 h à 1700 °C sous atmosphère réductrice (hydrogène) dans un four continu. Après frittage, les pastilles (qui forment un léger diabolo) sont rectifiées afin d’assurer leur cylindricité et d’obtenir le diamètre spécifié à une dizaine de micromètres près. Les pastilles sont aussi chanfreinées pour faciliter leur introduction dans la gaine.

Le fonctionnement nominal d’un REP et situations incidentelles

Le fonctionnement nominal 

Les crayons combustibles fonctionnent, en régime nominal, à des puissances linéiques moyennes (flux thermique transféré par un crayon moyen du cœur par unité de longueur) comprises entre 150 et 250 W.cm-1 . Un exemple d’évolution de la puissance linéique moyenne d’un crayon UO2 qui a subi une irradiation de 2 cycles à environ 220 W.cm-1 est présenté sur la Figure 5. Sous l’effet de l’épuisement du combustible, la puissance moyenne tend à diminuer au cours du temps. La période entre le chargement et le déchargement du combustible d’un réacteur est appelée un cycle. L’avancement de l’irradiation est évaluée par le taux de combustion du combustible, qui correspond au pourcentage d’atomes lourds ayant subi la fission (% FIMA ou at%). Couramment utilisé pour évaluer la quantité d’énergie thermique par unité de masse de matière fissile, il s’exprime aussi en mégawatts.jour par tonne de métal lourd initial (MWj/tML ou MWj/tU pour l’UO2).  Lors de la première montée en puissance, le centre de la pastille se dilate davantage, étant à une température plus élevée que la périphérie (Figure 6). La pastille combustible MOX ou UO2 se fracture en 6 ou 8 fragments radiaux. 

Les transitoires incidentels et accidentels

Un transitoire de puissance se traduit par une augmentation importante de la puissance et donc de la température de la pastille. Les transitoires les plus pénalisants pour le maintien de l’intégrité de la gaine sont les transitoires rapides

Fonctionnement incidentel en suivi de charge

 Lors d’essais expérimentaux, ce fonctionnement consiste en une augmentation plus ou moins rapide de la puissance. Cette hausse permet l’étude du comportement des pastilles en situation incidentelle et va impliquer une augmentation de la température moyenne de la pastille qui va donc se dilater. La Figure 7 montre une rampe jusqu’à 400 W.cm-1 conduite en réacteur de recherche. Elle comprend un palier de conditionnement du crayon dont la puissance correspond à la puissance linéique en fin d’irradiation de base et un palier haut à 400 W.cm-1 pendant 1 h. En cas de rupture de gaine, la rampe est interrompue. Cette augmentation rapide de la puissance influence le champ thermique dans la pastille, toujours refroidie en périphérie à travers la gaine par le fluide caloporteur. Ainsi sur la peau externe de la pastille, la température varie peu passant de 400 à 450 °C, alors que la température centrale du combustible peut passer de 950 à 1850 °C (Figure 6). Les températures élevées vont impliquer un fort relâchement des gaz de fission, qui va faire augmenter la pression interne du crayon. Dans le but d’évaluer le seuil de rupture du crayon dans ces conditions, ils sont simulés dans des réacteurs expérimentaux, tels que le futur RJH sur le site de Cadarache.

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