L’accouchement phénomène d’expulsion du nouveau-né

L’accouchement

L’accouchement, est le phénomène d’expulsion du nouveau-né, qui fait référence à la fin du processus de la grossesse, à la séparation des corps de la femme et de son fœtus, et qui signe la naissance. L’accouchement est, la plupart du temps, redouté par les femmes enceintes. Sur le plan de la réalité, il peut engendrer de la douleur physique et reste, malgré de grandes avancées médicales, une menace pour l’intégrité physique de la femme qui accouche, voire même un nt à naitre. 2 Dans sa dimension psychique, l’accouchement convoque à nouveau des capacités psychiques singulières chez la femme, et spécifiquement pour faire face à la problématique de la perte. Car l’accouchement est une situation dans laquelle elle est confro e à la perte de la maitrise de son corps et à la séparation physique du bébé qu’elle a porté pendant 9 mois. Freud (1926) souligne à ce propos, que, selon l’équation enfant=pénis, l’accouchement qui vient acter la séparation avec l’enfant, peut être considéré comme une castration. L’accouchement est donc une situation qui contraint simultanément la parturiente à la perte et à la passivité. La rupture de la naissance et la rencontre dans la réalité ou l’imaginaire, d’un danger vital peut avoir un impact traumatique pour la mère et pour l’enfant (Rank, 1924, Benedek, 1956 ; Racamier, 1979 ; Houzel, 1991 ; Bydlowski, 1997). Chez les femmes qui auraient fortement investi leur grossesse dans une dimension phallique, il est assez fréquent d’observer un mouvement dépressif, témoignant d’une difficulté à dépasser cette problématique de perte (Bydlowski, 1997). L’impact du traumatisme est amorti grâce à la relation anaclitique qui se développe entre la mère et son bébé et qui permet que se prolonge le régime narcissique prénatal (Racamier, 1979).

 Le post-partum.

Ces citations sont représentatives du temps si spécial du post-partum immédiat et des enjeux. Il est un temps suspendu dans lequel se condense des enjeux narcissiques et objectaux considérables multiples et intriqués. La nouvelle mère est toujours en proie aux remaniements psychiques et processus identificatoires qui ont débutés lors de la grossesse (identifications de la femme à son bébé en passant par celui qu’elle a été ou croit avoir été et la convocation des identifications aux imagos parentales et plus particulièrement maternels), est traversée par un courant inédit : le courant maternel. Simultanément, la nouvelle mère doit se remettre de son accouchement sur le plan physique et psychique, rencontrer son bébé et lui offrir les conditions optimales pour lui assurer la survie. Et enfin, dans un même temps, elle doit faire face à des réaménagements nécessaires au niveau conjugal et familial car, l’arrivée du bébé a aussi impacté l’économie psychique du couple et de la famille. Dans les cultures traditionnelles, le temps du post-partum immédiat renvoie à un temps de « marge et de réclusion » qui correspond à la période des quarante jours. Rochette-Guglielmi (2012) considère que ces quarante premiers jours, « dans leurs composantes fantasmatiques, biophysiologiques, culturelles et sociétales, marquent ce saut qualitatif de l’enfantement biologique à la naissance psychique tant pour la mère que pour le nouveau-né ». (Rochette- Guglielmi, 2012, p.23) La rencontre d’une mère avec son bébé est une situation anthropologique fondamentale (Laplanche, 2002). Lorsque la femme devient mère, un nouveau courant érotique émerge : le courant maternel. Celui-ci apparait dans les soins qu’elle dispense à son bébé (caresses, massages, baisers…) et notamment via l’allaitement. Braunschweig et Fain, (1975) ont souligné la valence érotique des investissements libidinaux dirigés vers l’enfant. Selon ces auteurs, le courant maternel peut être source de conflit psychique pour la mère. Ils proposent de nommer ce phénomène : « la censure de l’amante », la mère est distinguée en une « mère du jour » qui veille aux soins de son bébé et en « mère de nuit » qui redevient l’amante de son partenaire. Cette alternance du féminin maternel et féminin érotique a été soulignée par Guignard (1999) qui considère que l’investissement du maternel et celui du féminin ne peuvent fonctionner simultanément. Parat (1999), à travers son travail sur l’allaitement, propose d’envisager non pas une alternance mais la coexistence des courants et de leurs investissements respectifs, l’un pouvant être prévalent sur l’autre. Son travail sur l’allaitement a permis de mettre en évidence le conflit entre le maternel et le féminin.

Certaines femmes sont parfois dans l’impossibilité voire le refus de se vivre à la fois comme mère et comme amante : « d’avoir un corps nourricier et un corps désirable, désirant » (Parat, 2006, p.131). L’opposition sein nourricier et sein érotique est selon l’auteure, une défense contre la reviviscence des désirs œdipiens de la femme et de la tentation incestueuse. La relation conjugale maintenue permettrait à la femme qui allaite de trouver un équilibre entre courant tendre et érotique lors de l’allaitement. Nous avons vu précédemment, que les événements de la grossesse et l’accouchement ont soumis la femme à des vécus de passivité et de perte. En donnant la vie, la femme s’expose à des atteintes narcissiques importantes, notamment physiques : un corps qui se transforme, qui passe du plein au vide, un corps qui a pu été mutilé durant l’accouchement et qui doit être réparé, des seins qui se gorgent de lait et qui peuvent être douloureux. De nombreuses femmes expriment ce sentiment de perte de maitrise, d’un corps qui ne leur appartient plus. Le corps se transforme, il mue, elles perdent une peau pour en trouver une autre. Comme à l’adolescence, c’est un corps qui échappe à la maitrise et qui doit être réapproprié. La confrontation de la femme avec sa nouvelle identité de mère et un corps qui lui échappe sont autant de facteurs qui peuvent favoriser un vacillement identitaire particulièrement intense. Ces expériences peuvent contribuer à l’émergence d’angoisses d’effondrement, des sentiments d’irréalité et de dépersonnalisation. Ces changements corporels sont en lien avec la vie qu’elle a donnée et qu’elle doit désormais assurer. Son corps devient alors l’objet privilégié des pulsions et des besoins de son bébé. Cette dévotion particulière peut être à l’origine d’un sentiment d’asservissement qui comme le soulignent Cramer et Palacio-Espasa (1993) peut être interprété comme une marque d’infériorité féminine. Selon Cramer et Palacio-Espasa, ce qui va permettre à la mère de supporter ces atteintes, est la relation qui émerge entre elle et son bébé. Cette relation n’est pas immédiate, elle passe nécessairement par une étape particulièrement sensible : la rencontre du bébé réel.

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