Le développement du langage

Le langage

Il est important de faire la distinction entre les termes « langage » et « langue ». Le langage est une faculté innée commune à l’ensemble de l’humanité. C’est notre capacité à utiliser un système symbolique pour s’exprimer et communiquer. Quant à la langue, elle est dépeinte par Ferdinand de Saussure comme un produit social, une convention adoptée par une communauté linguistique. C’est un système particulier utilisant l’oral et parfois l’écrit.

Le développement du langage

De nombreux courants et chercheurs se sont interrogés sur l’acquisition et le développement du langage :
1. Le behaviorisme : approche des années 1920 développée principalement par les psychologue Burrhus Frederic Skinner, John Broadus Watson et le linguiste Leonard Bloomfield, elle considère le langage comme un apprentissage, une somme d’habitudes verbales.
2. L’innéisme : courant développé par le linguiste Noam Chomsky et le psychologue Steven Pinker considérant que la faculté de langage est innée et son développement autonome.
3. Le constructivisme : mouvement initié dans les années 1950-1960 par le psychologue Jean Piaget et la linguiste Hermine Sinclair expliquant que le développement du langage nécessite un certain développement cognitif.
4. Le fonctionnalisme : approche développée par le psycholinguiste Slobin démontrant que l’enfant sait qu’on lui parle, qu’il stocke et analyse l’information puis en dégage des principes opératoires qui lui permettent d’apprendre à parler.
5. L’interactionnisme : courant mené par de nombreux linguistes et psychologues tels que Laurence Lentin, Michael Tomasello, Lev Semionovitch Vygotsky, Henri Wallon et Jérôme Bruner. Ils considèrent que le langage est au coeur de l’interaction et l’interaction au coeur du langage. C’est parce que l’on parle à l’enfant que celuici apprend à parler.
Bien que les courants soient nombreux, la majorité s’accorde sur le fait que le langage relève de capacités innées et précoces. En effet, les prémices du langage ont d’ores et déjà lieu in-utéro. Le foetus possède des capacités de discrimination telles que la perception des différents sons (voix, musique, bruit) mais a également la capacité de distinguer et de différencier la voix de ses parents d’après les travaux du docteur Denis Querleu1.
Au stade de nouveau-né, l’enfant a une préférence pour la voix humaine par rapport aux autres sons selon William Condon et Louis Sanders2. Ainsi, son corps le prépare à l’acquisition du langage. De sa naissance à ses 8 mois, on observe une communication préverbale par le biais de gestes et de mimiques. Vers 4 – 5 mois, l’enfant développe des jeux vocaux qui lui permettront dès ses 6 mois d’imiter des schémas simples d’intonations produits par l’adulte. En effet, le nourrisson possède une prédisposition au traitement linguistique par sa précocité de discrimination des sons de la langue, sa discrimination catégorielle et sa reconnaissance de séquences de syllabes à partir de 7 mois. De 7 à 10 mois, on observe ainsi une segmentation des mots mais également une production préverbale par un babillage canonique (répétition de « syllabes » de type consonne-voyelle) qui accompagne ses premiers gestes communicatifs.
L’enfant passe peu à peu d’une relation duelle (lui et autrui) à une relation triadique (lui, autrui, un objet). L’attention conjointe se développe peu à peu.
Cette prédisposition sociale permet la communication dès les premiers instants de vie.
En effet, le langage se développe premièrement par une orientation vers autrui favorisé par le contact par le regard. De plus, d’après les recherches d’Andrew Meltzoff et Keith Moore3, l’enfant a des capacités d’imitation précoce lui permettant la protrusion de sa langue et l’ouverture de sa bouche en vue d’entrer en contact avec son entourage. Entre 11 et 12 mois, le babillage est plus varié puisqu’on assiste à des séquences polysyllabiques non identiques (paba, babe…) et par la suite à la production des premiers mots. Il s’ensuit alors une explosion lexicale entre 16 et 20 mois qui est parfois accompagnée de premières combinaisons de mots. Ce n’est qu’à l’âge de 2 ans que l’enfant combine les mots avec des mots fonctionnels, ce qui engendre l’émergence de la grammaire et donc la mise en place du système adulte.
En se développant, le langage met en oeuvre ses trois dimensions : psychoaffective, sociale et cognitive. En effet, en parlant, l’enfant prend conscience de son existence et affirme son identité notamment avec l’apparition du « je » aux alentours de ses 3 ans. Le langage lui permet aussi d’échanger avec autrui dans des environnements variés (maison, école), de partager ses émotions et de faire part de ses besoins. Dans un dernier temps, l’enfant prendra conscience de l’importance de l’oral, notamment dans les moments d’apprentissage.
Au fur et à mesure de son développement, l’enfant sera confronté aux deux dimensions du langage : l’oral et l’écrit. Les scientifiques s’accordent à dépeindre la langue comme un continuum allant de l’oral le plus spontané à l’écrit le plus formel. Ce continuum dispose d’un ensemble infini de variantes langagières diversifiées. L’oral et l’écrit sont donc considérés comme une seule et même langue. « Apprendre à parler » signifie alors que l’enfant doit s’approprier les différentes variantes de la langue qui vont lui permettre de s’exprimer dans toutes les situations de communications.
Il est important de noter que chaque enfant apprend à parler à des rythmes différents. Toutefois, il est impératif qu’il soit dans un environnement où on lui parle car l’input est déterminant chez l’enfant. De même, au fil des années, la variabilité interindividuelle est forte sur les plans quantitatif et qualitatif. Ce constat est néanmoins naturel puisqu’il résulte du développement et de l’environnement de chacun. Toutefois, afin que les inégalités ne perdurent dans le temps et au fil de la scolarité, le langage est désormais un domaine omniprésent au sein de l’école maternelle.

Un domaine omniprésent en maternelle

Dès l’apparition de l’école maternelle, Pauline Kergomard a insisté sur la difficulté d’appropriation de la langue de l’école et sa maitrise nécessaire pour une réussite des apprentissages. Depuis, la place du langage à l’école maternelle ne cesse d’évoluer. En effet, nous constatons une grande évolution des instructions officielles depuis 1977 où nous assistons au passage du terme « orientations pour l’école maternelle » à celui de « programmes » en 1995.
De plus, le langage n’occupe que l’avant dernière position parmi les rôles et objectifs de la maternelle : développer l’affectivité et le corps, le mouvement, l’action, l’expression vocale, la musique, l’image, les représentations iconiques, l’expression plastique, le langage oral et le langage écrit, le développement cognitif. Par sa primarisation et donc la nécessité de revoir ses modalités de fonctionnement et ses prérogatives, la maternelle devient un lieu d’apprentissage au début des années 1990. L’apparition d’apprentissages structurés sous forme de programmes en 1995, lègue une place au langage sous l’appellation « Apprendre à parler et à construire son langage, s’initier au monde de l’écrit ». En 1999, le Bulletin Officiel hors-série n°8 du 21 octobre se pare de la maxime suivante : « L’école de tous les possibles. Les langages, priorité de l’école maternelle ». Grâce à cet engouement ainsi que les programmes de 1995, la naissance de domaines d’activités au sein de la maternelle dresse un nouveau tournant. Ces programmes attestent enfin que le langage est au premier plan puisqu’il permet la structuration des apprentissages. Le domaine d’activité qui lui est dédié se nomme alors « Le langage au coeur des apprentissages », de même dans les programmes de 2007. Cette première place parmi les domaines est depuis sans cesse réaffirmée au sein des programmes de l’Education Nationale.
Ainsi, dans les programmes de 2015, le langage est omniprésent puisqu’il en constitue le noyau central. Il est même désigné comme étant « la condition essentielle de la réussite de toutes et de tous ».
Nommé « Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions », le domaine d’apprentissage dédié au langage regroupe à la fois la dimension orale et la dimension écrite.
Les enjeux sont de stimuler le langage oral des élèves et de le structurer pour pouvoir mener à bien une entrée progressive dans la culture de l’écrit. L’oral et l’écrit sont interdépendants dans notre société et, de ce fait, ce continuum est également présent en maternelle. En effet, l’une de nos missions est de montrer aux enfants l’importance de l’oral et de l’écrit notamment à travers la communication.

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