Les dispositifs de gouvernement du Plan triennal 2015-2017

Les dispositifs de gouvernement du Plan triennal 2015-2017

L’année 2015 a vu la naissance d’une forme de planification inédite dans le secteur sanitaire français. D’abord annoncé par la ministre de la Santé comme un plan d’économies (Communiqué de presse du ministère de la Santé du 3 mars 2015), le Plan triennal prendra ensuite la forme d’un Plan national de gestion du risque financier et d’efficience du système de soins (2016), pour être finalement décrit dans la documentation de l’ANAP comme un plan d’évolution structurelle du système de santé (ANAP, 2017). L’absence d’une dénomination fixe du Plan, en dehors de celle liée à sa durée, révèle une certaine difficulté des acteurs du système de santé à qualifier cet ensemble nouveau de dispositifs. Comme nous le verrons, cet ensemble inclut des dispositifs préexistants de planification et de régulation – au sens de Lenay (2005) et Cazin (2017). Mais il comprend également une série de dispositifs originaux, présentant certaines des caractéristiques de la stimulation de l’exploration collective. Le Plan triennal 2015-2017 du ministère de la Santé peut par conséquent être considéré comme une des tentatives récentes d’articulation entre les trois formes de gouvernementalité du secteur sanitaire que nous avons présentées en section précédente. Cette tentative est un terrain particulièrement intéressant au regard de notre questionnement de recherche, dans la mesure où l’une des solutions qui y a été testée a précisément consisté à mettre en place une régulation souple intermédiée pour une partie du Plan. Nous exposons donc d’abord l’articulation entre formes de gouvernementalité sanitaire propre au Plan triennal. Puis nous analysons la gouvernance spécifique du Plan en tant que régime de régulation (Levi-Faur, 2011), afin d’isoler le périmètre d’action publique sur lequel se sont appliqués des dispositifs de régulation souple intermédiée.

Nous examinerons ensuite plus en détail la composante de Le terme de « plan » évoque en premier lieu la planification. De fait, le Plan triennal a mobilisé certains des outils de la planification sanitaire que nous avons précédemment décrits. Mais il convient de noter, avant toute autre chose, que ce plan sanitaire s’est inscrit dans une planification dépassant ce seul secteur. Le communiqué de presse du ministère de la Santé relatif au Plan triennal, en date du 3 mars 2015, précisait d’amblée le cadre général dans lequel ce Plan se situait. Il s’agissait du Pacte de responsabilité et de solidarité annoncé par le Président de la République française le 31 décembre 2013. Ce Pacte prévoyait un allégement de charges de 10 milliards d’euros en faveur des entreprises françaises, afin d’accroitre leur compétitivité vis-à-vis de leurs concurrents européens par un abaissement du coût du travail. Ce Pacte était lui-même la résultante de la procédure pour déficit excessif initiée à l’encontre de la France par la Commission européenne en 2009 en application de l’article 126 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Cette procédure peut être déclenchée contre les pays de la Zone euro qui ne respectent pas les deux critères d’équilibre des finances publiques définis par le Pacte de stabilité et de croissance adopté en juin 1997 par le Conseil européen, c’est-à-dire : 1. un déficit budgétaire inférieur à 3 % du produit intérieur brut (PIB) ; et 2. une dette publique inférieure à 60 % du PIB. Chaque pays concerné par cette procédure doit présenter aux instances de l’Union européenne un plan de mesures correctives destinées à ramener ces deux indicateurs macro-économiques en-deçà des niveaux requis. Le Pacte de responsabilité et de solidarité indiquait le plan de mesures correctives envisagées par la France en avril 2014. Par ce Pacte de responsabilité et de solidarité, la France s’engageait vis- à-vis de ses partenaires européens à une économie globale de 50 milliards d’euros sur l’ensemble des budgets publics nationaux, dont 10 milliards concernaient les dépenses d’assurance maladie. La logique du Pacte était donc de contribuer à la réduction des déficits publics par une économie budgétaire restituée aux entreprises nationales sous forme d’allégement de charges, dans l’espoir que cet allégement contribuerait à une relance de la croissance du PIB.

Le Plan triennal constituait par conséquent le volet sanitaire d’un plan national d’économies plus vaste, conduit en réponse aux mécanismes de surveillance budgétaire planifiés à l’échelon européen. Le Plan triennal s’est articulé autour de quatre axes stratégiques, qui furent présentés par la Direction de la Sécurité sociale (DSS) du ministère de la Santé aux personnes responsables de la mise en œuvre du Plan dans les ARS lors d’un séminaire organisé par l’ANAP le 18 mars 2015. Ces axes étaient énumérés et intitulés comme suit : 1. « efficacité de la dépense hospitalière » ; 2. « virage ambulatoire et adéquation de la prise en charge en établissement » ; 3. « produits de santé et promotion des génériques » ; et 4. « pertinence et bon usage des soins ». Chacun de ces axes était décliné en trois programmes. Le premier axe, relatif à l’efficacité de la dépense hospitalière, incluait les programmes suivants : 1. l’optimisation des dépenses des établissements de santé, notamment à travers les regroupements en GHT ; 2. l’optimisation des achats ; et 3. la gestion des médicaments financés en sus des séjours.

 

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