Les panneaux sandwich à âme pliée

Les panneaux sandwich à âme pliée

La motivation originelle de ce travail est l’étude d’un nouveau type d’âme de panneau sandwich : le module à chevrons. En effet le marché des panneaux sandwichs est un marché encore jeune et en mutation dans lequel il existe des opportunités d’innovation. En particulier les panneaux sandwichs offrent des possibilités d’économie de matière dans l’habitat qu’il est tout a fait d’actualité de considérer. Étudier un nouveau type d’âme de panneau sandwich nécessite donc une bonne compréhension de ce marché ainsi que des questions scientifiques sous-jacentes. Dans ce chapitre, on propose tout d’abord une présentation des pliages structurels périodiques en Section 2.1. En vue de leur utilisation comme âme de panneau sandwich, une introduction à ces panneaux et leur marché est proposée en Section 2.2. Cette analyse mettra en évidence que ce marché est essentiellement structuré autour du comportement mécanique des panneaux sandwichs. Plus particulièrement, une analyse mécanique simplifiée montre que l’âme joue un rôle essentiel dans la résistance du panneau sandwich à l’effort tranchant. Finalement, en gardant en mémoire les contraintes posées par le marché des panneaux sandwichs, une revue des procédés technologiques existants est effectuée en Section 2.3. 

Les pliages structurels périodiques 

Les pliages structurels périodiques sont des pliages périodiques qui donnent un volume à la feuille initialement plane. Ainsi la feuille présente un relief qui peut être exploité pour ses propriétés cinématiques ou structurelles. Un exemple simple est le soufflet d’un accordéon qui permet les amples mouvement du musicien tout en servant de réserve d’air à débit contrôlé. Il existe un très grand nombre de pliages de ce type. On donne ici quelques éléments pour les distinguer puis on indiquera quelques applications envisageables pour le plus connu d’entre eux, le module à chevrons.  Les panneaux sandwich à âme pliée.

Les différent types de pliages structurels périodiques 

Les pliages structurels périodiques sont aussi nommés tessellations (pavages) dans le vocabulaire des origamistes (plieurs de papier). Ils font appel à des motifs dont l’origine est très ancienne et sont rattachés aux pliages traditionnels en origami. Par ailleurs, ces motifs sont aussi très utilisés par les plisseurs de tissus (Voir les Ateliers Lognon à Paris). Ceux-ci utilisent des moules en carton (Figure 2.1) pour étuver des tissus utilisés dans la haute couture (Figure 2.2). Figure 2.1 – Un moule utilisé pour le plissage des tissus (Sid, 2009) Figure 2.2 – Une robe réalisée avec un tissu plissé (Lognon, 2010) Bien qu’il semble y avoir une très grande variété de motifs possibles, les origamis doivent respecter certaines règles géométriques. En effet, il est bien connu qu’une feuille de papier peut être assimilée à une surface développable car elle est pratiquement inextensible dans son plan en comparaison de sa faible raideur en flexion (Cerda and Mahadevan, 2005). Ainsi, lorsqu’on plie une feuille, on ne fait qu’introduire des singularités de courbure localisées au niveau du pli. La surface engendrée demeure une surface développable. On dit alors que la feuille est isométrique au plan. Le fait de se limiter au pli et de s’interdire toute coupure de la feuille n’est donc pas sans contrainte. Il existe un certain nombre de résultats formalisant les conditions de pliabilité. Dans le cas de pliages à plat, quelques théorèmes fixant des règles de pliabilité sont rappelés en Encadré 2.1. Ces conditions locales de refermeture à chaque intersection de plis ne sont pas suffisantes pour garantir la refermeture de l’ensemble de la feuille. En réalité, savoir s’il est possible de replier une feuille en partant d’un dessin des plis à plat (crease pattern) vérifiant les conditions locales de refermeture est un problème ouvert (Demaine and Demaine, 2001). Plus récemment dans cette thématique, Tachi (2009) s’est intéressé à la cinématique d’ensemble de pliages complexes. Dans le cas des pliages tridimensionnels, on rappellera les travaux de Duncan and Duncan (1982) sur la cinématique des plis courbes, illustrant la nécessité d’employer la géométrie différentielle pour décrire correctement les déformations acceptables par pliage. Enfin, des techniques systématiques pour générer de tels motifs ont été proposées par Kling (1997, 2005) et sont présentées en Figure 2.3. Parmi ces nombreux motifs, le plus connu de tous est le module à chevrons (chevron pattern ). Ce pliage est aussi connu sous le nom de Miura-Ori (littéralement : origami de Miura, en hommage à un de ses fervents promoteurs, Koryo Miura) ainsi que herringbone-pleating et enfin Zeta-Core (nom donné au pliage par Miura lui-même (Miura, 1972)). Figure 2.3 – Motif générés par la théorie de Kling Le module à chevrons est un motif extrêmement simple, dont la maille élémentaire est constituée de quatre parallélogrammes identiques (Figure 2.4). Le paramétrage complet du motif est donné au Chapitre 3. Un des compétiteurs du module à chevrons envisagé sérieusement est le motif nommé Matted (Figure 2.5). Ce motif est légèrement plus complexe et semblerait offrir une plus grande résistance. Cependant, notre cadre d’étude se restreindra au module à chevrons qui est le plus simple à modéliser. 

 Les applications possibles 

On peut recenser un nombre important d’applications possibles pour ces motifs. En voici une liste non exhaustive pour le module à chevrons. – Absorbeur de chocs : des études montrent que le module à chevrons présente de bonnes caractéristiques pour être utilisé comme absorbeur de chocs (Basily and Elsayed, 2004b). On peut donc envisager de l’employer dans les emballages ou comme absorbeur de choc pour le parachutage de matériel. – Échangeur double flux : comme le module à chevrons est une feuille sans coupure, il sépare deux domaines bien définis. Il est possible de faire circuler séparément deux fluides caloporteurs à contre courant (Figure 2.6). Ainsi le module à chevrons est un bon candidat pour des échangeur double-flux efficaces et économes à fabriquer. Pour obtenir de bons échangeurs de chaleur, il faut être capable non seulement de concentrer une grande surface dans un petit volume, mais aussi de bien mélanger chaque fluide au cours de l’échange. Le module à chevrons présente une grande surface spécifique et sa forme ondulée facilite la création de tourbillons ce qui lui confère de bonnes capacités d’échange. Les travaux de Zhang et al. (2004) sur un motif apparenté au module à chevrons illustrent ce potentiel. – Revêtement : le relief donné à une feuille métallique par le module à chevrons lui donne une plus grande inertie dans les deux directions principales de flexion. On peut donc envisager des applications similaires à la tôle ondulée et au bardage. De plus, les qualités esthétiques et de formabilité du module à chevrons peuvent en faire un matériau apprécié des architectes et des designers. – Âme de panneau sandwich : C’est cette application qui fait l’objet de ce travail. Une présentation détaillée des panneaux sandwichs est l’objet de la section qui suit.

Le marché des panneaux sandwichs et ses exigences

 L’idée de prendre en sandwich un matériau léger et peu résistant entre deux couches d’un matériau noble afin d’obtenir une plaque plus résistante et plus raide en flexion à poids donné est assez ancienne. Certains la font remonter à Léonard de Vinci, d’autres au pont tubulaire sur la rivière Conwy au Royaume-Uni de Sir W. Fairbairn 1849 (Allen, 1969) et enfin certains voient dans la structure poreuse des os du crâne un exemple intemporel (Thompson, 1917; Gibson and Ashby, 1988). Aujourd’hui ce concept multiforme peut être regroupé sous la notion de panneau sandwich. Les deux couches de matériau noble sont généralement assez minces et sont appelées les peaux (skins). La couche “tendre” est appelée âme (core) en référence à l’âme des poutres profilées en I (Figure 2.7). Il est communément admis que cet agencement de la matière est optimal pour maximiser la raideur en flexion d’une plaque, à poids et gabarit donné (Laszczyk, 2010). Le premier champ d’application dans lequel la question du poids s’est posée sérieusement est l’aéronautique et la première application industrielle reconnue est l’utilisation de panneaux sandwichs composés de contreplaqué pour les peaux et de balsa pour l’âme dans le fuselage d’un avion de combat Britannique lors de la seconde Guerre Mondiale, le De Havilland Mosquito. Aujourd’hui, les panneaux sandwichs sont des structures qui se retrouvent dans de nombreuses applications. Le plus répandu des panneaux sandwichs est le carton ondulé (Figure 2.8) qui consiste à coller entre deux feuilles de papier kraft, une feuille ondulée en guise d’âme. Les panneaux sandwichs sont aussi  répandus dans la construction comme panneaux d’isolation (Figure 2.9), éléments de cloisons et de mobilier (Portes Isoplanes). Enfin, leur excellente capacité structurelle rapportée à leur poids en font un matériau roi dans l’aéronautique et l’aérospatiale (Figure 2.10). 

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