Procédés de fabrication des noirs de carbone

Noirs de carbone

Généralités

L’appellation générique « noir de carbone » désigne un large éventail de produits carbonés issus de différents procédés tels que le procédé furnace (au four), le procédé channel (de contact), le procédé lampblack (noir de fumée), le procédé noir d’acétylène, le procédé thermal ou encore le procédé plasma [1]. Quel que soit le procédé de fabrication, les noirs de carbone appartiennent à la classe des carbones aromatiques turbostratiques, caractérisés par des températures de formation comprises entre 700 et 2500 °C. Leur structure n’est pas à proprement parler cristalline (structure tridimensionnelle ou 3D) mais les couches aromatiques qui les composent sont des graphènes (structure 2D) empilés parallèlement avec un désordre par rotation qui est à l’origine du terme turbostratique (figure I.1). Par un traitement thermique ultérieur prolongé jusqu’à 3000 °C, certains de ces carbones s’ordonnent progressivement pour tendre vers la structure 3D du graphite (carbones graphitables). D’autres au contraire conservent une structure 2D (carbones non graphitables) Figure I. 1 : Modèle représentant la structure en coupe d’une particule de noir de carbone composée de microcristallites [2]. Le noir de carbone est du carbone finement divisé. On distingue plusieurs niveaux de structures (figure I.2). Le premier niveau est constitué de particules élémentaires qui se présentent généralement sous des formes presque sphériques. Leurs diamètres varient entre quelques dizaines et quelques centaines Noirs de carbone Chapitre I : Synthèse de nanoparticules de carbone, Etat de l’art 14 de nanomètres. Ces particules sont regroupées en structures secondaires ou agrégats, eux-mêmes regroupés en agglomérats. Alors que les deux premiers niveaux de structures (particules et agrégats) mettent en jeu des liaisons fortes de type covalente, l’organisation en agglomérats résulte de liaisons de type Van Der Waals. Les noirs de carbone ne sont pas exclusivement constitués de carbone pur, ils contiennent aussi d’autres éléments comme le soufre, l’oxygène, l’hydrogène ou l’azote. La quantité de ces éléments dépend des procédés de fabrication et de la nature de la matière première. Figure I. 2 : Microstructure du noir de carbone [3]. • Applications du noir de carbone En 2005, la production annuelle de noirs de carbone est estimée à environ 8 millions de tonnes. Près de 90 % de la production mondiale de noir de carbone est utilisée dans l’industrie des pneumatiques. En effet, utilisé en apport aux élastomères, il permet une augmentation de la résistance à la rupture et des caractéristiques de résistance à l’usure. Les caractéristiques principales des noirs de carbone influant sur les propriétés finales des élastomères sont : la taille des particules, la taille et la morphologie des agrégats et leur microstructure. Elles sont liées à la nature de la surface du noir de carbone, son organisation structurale, sa structure poreuse, sa surface spécifique et sa composition chimique. Le noir de carbone est également utilisé comme charge pour les plastiques et les peintures. Il modifie les propriétés mécaniques, électriques et optiques des matériaux dans lesquels il est dispersé, déterminant ainsi leurs applications finales. Mélangé aux plastiques, le noir de carbone assure les propriétés suivantes : protection aux UV, profondeur du noir, opacité et renforcement. Agrégation de : Particules primaires • sphériques • nanométriques jusqu’à Agrégats secondaires • poreux • structurés Formation d’agglomérats Chapitre I : Synthèse de nanoparticules de carbone, Etat de l’art 15 Le noir de carbone est un pigment pour le toner xérographique. Il assure un rôle de contrôle d’un niveau convenable de charge électrique sur le toner, ce qui est essentiel pour le bon fonctionnement des copieurs électrographiques et des imprimantes. Enfin, certains types de noirs de carbone étant conducteurs de l’électricité, ils permettent d’apporter une bonne conductivité aux polymères thermoplastiques.

Procédés de fabrication des noirs de carbone

D’un point de vue chimique, les procédés de fabrication des noirs de carbone peuvent être classés en deux catégories : • Procédés basés sur la combustion incomplète d’hydrocarbures, • Procédés basés sur la décomposition thermique d’hydrocarbures. Ces deux catégories diffèrent par la présence ou l’absence d’oxygène dans le milieu. Les procédés basés sur la combustion incomplète, appelée décomposition thermo-oxydante, sont les plus développés. Quantitativement, les procédés basés sur la décomposition thermique d’hydrocarbures en absence d’oxygène, jouent un rôle très limité.

Procédés conventionnels Les procédés utilisés pour la fabrication de noir de carbone peuvent être classés suivant les critères répertoriés dans le tableau I.1. En dehors du procédé de synthèse du noir d’acétylène, les matières premières utilisées sont majoritairement des huiles lourdes à fort contenu d’huiles aromatiques. Le gaz naturel peut être également utilisé comme matière première. Processus chimiques Procédés Matières premières Furnace Huiles aromatiques, gaz naturel Système fermé (régime turbulent) Décomposition Lampblack Huiles aromatiques thermo-oxydante Système ouvert (diffusion flames) Channel Gaz naturel Décomposition Procédé discontinu Thermal black Gaz naturel (huiles) thermique Procédé continu Acetylene black Acétylène Tableau I. 1 : Classification des différents procédés de fabrication de noir de carbone.  Dans le procédé à l’acétylène, le noir de carbone est produit par décomposition thermique en absence d’oxygène. L’acétylène est thermodynamiquement instable. Il se décompose en hydrogène et en carbone au cours d’une réaction très exothermique. Après un bref préchauffage du réacteur par la combustion de l’acétylène, l’arrivée d’air est arrêtée, permettant la formation de noir de carbone. La réaction auto-entretenue continue jusqu’à ce que l’alimentation en acétylène soit arrêtée. Les conditions de réaction, avec une température de l’ordre de 2500 K, et l’hydrocarbure utilisé confèrent au noir d’acétylène des propriétés uniques : une grande pureté et un haut degré d’organisation micro structurale situé entre celui du noir de carbone de type furnace et celui du graphite. Dans le domaine des noirs de carbone, les noirs d’acétylène constituent des produits bien spécifiques, à forte valeur ajoutée et réservés à quelques applications très particulières. De par leur caractère conducteur marqué, ils sont principalement utilisés dans les piles électriques salines de type Leclanché. Ils sont employés aussi dans d’autres domaines tels que l’électronique ou encore la câblerie. Actuellement plus de 95 % des noirs de carbone utilisés dans l’industrie sont issus du procédé furnace ou procédé au four, représenté à la figure I.3. Fondé sur la combustion incomplète d’hydrocarbures1 , il fonctionne en continu dans un réacteur fermé avec des vitesses de fluide élevées. Ce procédé présente toutefois plusieurs inconvénients. Tout d’abord, il est responsable de l’émission annuelle de plus de 25 millions de tonnes de CO2, gaz principalement responsable de l’effet de serre d’origine humaine. En plus de ces émissions de CO2, le procédé émet d’importants rejets d’espèces polluantes : NOx, SH2, CO… Une autre limite du procédé furnace est son faible rendement en matière, de l’ordre de 30 %. Cela s’explique par le fait que la majorité du carbone contenu dans la matière première sert à apporter, par combustion, l’énergie nécessaire au craquage de la fraction restante. Enfin, malgré l’optimisation du procédé, il reste limité par sa température de réaction. En effet, celle-ci est fonction de la nature de l’hydrocarbure et des conditions de combustion, soit du rapport hydrocarbure/air. Figure I. 3 : Schéma du procédé furnace .La combustion d’un hydrocarbure est incomplète lorsque la réaction s’effectue avec un défaut d’oxygène. Elle produit du CO, du CO2, l’H2O et des hydrocarbures imbrûlés. La combustion complète d’un hydrocarbure produit uniquement du CO2 et du H2O.

Chapitre I : Synthèse de nanoparticules de carbone

Procédés plasma

Depuis les années 1960, de nombreuses études sont consacrées aux transformations physiques et chimiques dans les plasmas [4]. Ces vingt dernières années, le potentiel des procédés plasma pour la synthèse de nanoparticules carbonées telles que les noirs de carbone, les fullerènes [5], [6] ou les nanotubes a rapidement été mis en exergue dans de nombreuses publications [7]. Pour la production de noir de carbone en particulier, le craquage d’hydrocarbures par plasma apparaît comme une voie prometteuse permettant à la fois de réduire la pollution et d’augmenter les rendements. Les premiers brevets déposés pour la production de noirs de carbone par plasma à l’échelle du laboratoire datent de 1920 et sont basés sur le principe de l’arc électrique [8], [9]. De façon générale, la majorité des publications et des brevets déposés concerne la technologie des plasmas thermiques. Ce concept de synthèse de noir de carbone par plasma a abouti aujourd’hui au développement de deux technologies concurrentes et brevetées. Ces deux principales technologies sont basées sur l’utilisation d’un plasma thermique. Il s’agit, en Norvège, de la technologie «Carbon Black & Hydrogen » développée par Kvaerner et, en France, de la technologie du procédé triphasé développée par l’Ecole des Mines de Paris, le CNRS et le partenaire industriel Timcal. En 1998, Kvaerner a installé au Canada une usine conçue pour produire annuellement 20000 tonnes de noirs de carbone et 50 millions normal mètres cubes d’hydrogène. Le gaz plasmagène utilisé est l’hydrogène recyclé issu du procédé. La consommation d’énergie du CB&H de Kvaerner est théoriquement de 1 kWh/m3 H2, mais elle s’avère en réalité plus de deux fois supérieure en raison de la température élevée de la réaction. Le surplus d’énergie peut, jusqu’à un certain point, être recyclé sous forme de vapeur. A notre connaissance, la production débutée en juin 1999 [19], [20], a été arrêtée pour des raisons techniques et économiques. Concernant le procédé triphasé, ce dernier est toujours en cours de développement au CEP, Sophia-antipolis, en collaboration avec le partenaire industriel Timcal. Les plasmas thermiques sont très « énergivores » et sont caractérisés par des températures minimales d’environ 6000 K2 . Or, les réactions de synthèse de noirs de carbone ne nécessitent que des températures de l’ordre de 1500 °C. Ceci explique que les recherches se soient orientées vers des plasmas à plus faible température, soit les plasmas hors-équilibre thermodynamique ou plasmas froids. Dans ces procédés, le plasma n’intervient pas seulement comme source de chaleur, il peut aussi jouer dans certains cas le rôle d’agent catalytique. Les réactions chimiques se déroulant au cours de la synthèse peuvent s’apparenter à des réactions de catalyse en phase homogène.

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