SURVEILLANCE ET DIAGNOSTIC DES DÉFAUTS DES MACHINES TOURNANTES 

SURVEILLANCE ET DIAGNOSTIC DES DÉFAUTS DES MACHINES TOURNANTES 

Principales défaillances des machines tournantes

Défauts de roulement

Une étude statistique effectué par Bonnett en 2008, a dévoilé que 69% de défaillances affectant les moteurs asynchrones à grande puissance, sont des défauts de roulements [106]. Cela signifie que les roulements sont les organes les plus importants et les plus fragiles des machines tournantes. Ces composants sont conçus pour assurer plusieurs fonctions parmi lesquelles : assurer la liaison mobile en rotation entre deux surfaces avec un minimum de frottement et en supportant des différentes charges radiales ou axiales ; corriger les défauts d’alignement en assurant un positionnement précis de l’arbre. Un roulement est généralement composé de quatre éléments essentiels : une bague extérieure, une bague intérieure, un liquide lubrifiant et des éléments roulants qui peuvent être des billes, des rouleaux ou même des aiguilles. En pratique, le choix du roulement adéquat dépend du type d’application à réaliser où chaque classe de roulement détient des caractéristiques spécifiques en termes de vitesse limite de rotation, de charges radiales et axiales supportées ou même de défaut d’alignement admissible. La figure I.1 montre les différents composants d’un roulement à bille et les principaux types de roulements sont illustrés dans la figure I.2. Figure I.1 Constitution d’un roulement à bille. Figure I.2 Principaux types de roulements [102]. On peut distinguer plusieurs avaries affectant les roulements, et causées par quatre grandes familles de causes, qu’on peut les répertoriées comme suit [103-105] : – Dégradations liées à une mauvaise lubrification, couvrant 36% des cas : quel que soit un manque ou un excès de lubrifiant qui peut produire une augmentation de la température du roulement, conduisant à une rupture des bagues, écaillage, grippage et détérioration des cages. – Dégradations liées à des contraintes mécaniques excessives, couvrant 34% des cas : comme la vitesse, les charges radiales et axiales exercées sur les points de contact 11 entre les éléments roulants et les bagues, pouvant causer un écaillage, détérioration des cages et grippage. – Dégradations liées au montage incorrect, couvrant 16% des cas : comme les défauts d’alignement, traces de coups, empreintes des corps roulants, corrosion par contact et certaines détériorations de cages. – Dégradations liées au milieu industriel difficile, couvrant 14% des cas : comme l’environnement humide et la présence des acides causant la corrosion du roulement, la présence des polluants de nature abrasive comme la poussière et le sable, qui contaminent le lubrifiant, dégradent la surface de roulement et causant son usure. La figure I.3 montre quelques exemples des principales défaillances altérant le fonctionnement des roulements. Figure I.3 Exemples de défaillances affectant les roulements ; a: grippage, b: fracture, c: usure de contact, d: corrosion de contact, e: écaillage de la bague interne.

Défauts d’engrenage

Les engrenages sont des organes vitaux et des mécanismes élémentaires dans la constitution d’une machine tournante. Cet organe est composé de deux roues dentées, dont l’une entraîne l’autre par l’action de dents en contact, et qui tournent autour d’un axe de rotation à des vitesses différentes. Ils sont utilisés pour transmettre le mouvement de rotation d’un axe à un autre, changer la direction du mouvement rotatif et même pour adapter les vitesses de rotation. La figure I.4 montre les différents types d’engrenage utilisés dans l’industrie. Figure I.4 Différents types d’engrenages utilisés dans l’industrie ; a: engrenage droit à denture droite, b: engrenage droit à denture hélicoïdale, c: engrenage conique, d: engrenage roue et vis sans fin. Les engrenages sont des organes sensibles dans la chaine cinématique de la machine et ils sont soumis à un grand nombre d’avaries qui peuvent apparaitre lors de leurs fonctionnements dans des conditions de travail pénible. Les figures I.5, I.6 et I.7 illustrent quelques exemples de défauts abimant le fonctionnement sain des engrenages. Si on met à l’écart les défauts de fabrication et de montage (comme excentricité des roues et les défauts de parallélisme), on peut distinguer principalement deux catégories de défauts pouvant altérer le fonctionnement normal des engrenages [12] : – Défauts généralisés : sont des défauts qui affectent une grande partie ou toutes les dentures d’engrenage comme l’usure abrasive et les piqûres (ou pitting). – Figure I.5 Défauts de piqûres ou pitting. 13 – Défauts localisés : sont généralement des défauts qui se localisent sur des dents particulières et ils peuvent conduire rapidement à la rupture de ces dents, comme l’écaillage, le grippage et la fissuration. Figure I.6 Défauts de grippage. Figure I.7 Défauts d’engrenages ; a: écaillage, b: fissuration de dent, c: rupture de dents.

Le balourd

Le balourd ou encore appelé défaut d’équilibrage, est la cause des vibrations la plus fréquemment rencontrée au niveau des machines tournantes. Il est dû à une distribution inégale de la masse d’un rotor autour de son axe. En réalité, il est impossible de faire coïncider l’axe de rotation avec le centre de gravité de chaque tranche élémentaire du rotor lors de la construction des machines. Les causes de l’apparition d’un déséquilibre (balourd) sont multiples, et ils peuvent avoir comme origines : – Défaut d’usinage d’assemblage des rotors ou de montage. La figure I.8 clarifie les problèmes d’excentricité et de parallélisme des balourds dus aux écarts d’usinage. – Balourd évolutif : ce phénomène est dû généralement aux frottements de l’arbre avec un des paliers de la machine tournante, ce qui provoque un échauffement dissymétrique. – Origines mécaniques : comme la dégradation des pales ou aubages, l’érosion ou dépôt de matière et fluage du rotor, etc. – Origines thermiques : où la variation de la température modifie la géométrie des parties tournantes, ce qui conduit à une déformation des rotors, fissuration transverse de l’arbre, dissymétrie d’arbre, glissement et dilatation contrariée des bobinages de machines électriques. Figure I.8 Écarts d’usinage : excentricité et parallélisme. 

Défauts d’alignement

L’arbre est une partie fondamentale de la machine tournante, et il sert à assurer la transmission de la puissance et du mouvement de rotation. Cet organe joue aussi le rôle d’un élément de soutien et de liaison pour les autres parties de la machine. Le défaut d’alignement connu aussi sous les noms ‘désalignement ou délignage’, est un problème presque aussi commun que le balourd et il peut apparaitre lorsque les axes de rotation de deux ou plusieurs arbres de machines, ne sont pas parfaitement aligné. La figure I.9 montre les différents types de désalignement. 15 Ce phénomène provoque une augmentation des forces radiales et axiales sur les accouplements, les roulements et les joints, ce qui conduit à l’usure de ces composants et à une flexion de l’arbre en réduisant la quantité de puissance transmise. Divers facteurs peuvent être l’origine du mauvais alignement de l’arbre, qui se résument comme suit : – Avaries liées à des contraintes mécaniques : comme le desserrage des pieds de fixation ou le déplacement des patins de la machine, dus aux vibrations de cette dernière. – Avaries liées à des contraintes thermiques : tels que la variation de la température et l’expansion thermique des pièces dû à l’échauffement de la machine en fonctionnement. – La modification des paramètres mineurs de processus comme la pression. Figure I.9 Défauts d’alignement. 

Classification des méthodes pour l’élaboration d’un système de diagnostic industriel

Les stratégies de diagnostic de défauts exploitées dans le milieu industriel sont diverses et variées [15]. Leur principe de base repose sur une comparaison entre les données observées au cours du fonctionnement de la machine et les connaissances acquises sur son comportement normal et son comportement dans le cas d’une éventuelle présence d’un défaut [16]. Le choix d’une méthode de diagnostic par rapport à une autre s’effectue en fonction de deux principaux critères : les connaissances a priori et les connaissances issues des observations. La connaissance a priori peut être acquise soit par l’analyse de l’historique du système étudié en tirant les indicateurs pertinents pour l’identification des modes de fonctionnement « mode de fonctionnement sans défaut et mode de fonctionnement défaillant », ou par l’analyse d’un expert reliant les différents modes de fonctionnement à leurs causes et symptômes. Les connaissances issues des observations sont généralement acquises de façon directe à l’aide des capteurs, où la transformation et l’analyse de l’ensemble d’informations recueillies à un instant t sont nécessaires afin d’identifier le mode de fonctionnement du système. Nous pouvons faire une classification non exhaustive des principales méthodes de diagnostic rencontrées dans la littérature selon deux grands axes : les approches à base de modèles et les approches sans modèles. Pour plus de détails nous référons les lecteurs aux travaux suivants :

Méthodes de diagnostic à base de modèles

Ces approches sont basées sur la comparaison du comportement observé du système par rapport au comportement prédit du modèle qualitatif et/ou quantitatif établi [20]. La présence d’un écart dans cette comparaison signifie la détection d’une défaillance, comme indiqué dans la figure I.10. On distingue deux branches de méthodes selon le type du modèle à établir : les méthodes quantitatives et les méthodes qualitatives. Les méthodes de diagnostic à base de modèles quantitatifs reposent sur l’estimation de l’état de fonctionnement en utilisant des modèles mathématiques simulant le comportement du système. S’il existe un écart dépassant un certain seuil entre ces modèles et les variables du système, une défaillance est alors détectée. Après la phase de détection, un résidu sera généré et comparé avec toutes les signatures de défauts connues pour isoler et localiser la défaillance. Parmi les différentes méthodes de diagnostic utilisant des modèles mathématiques : La méthode à base d’observateur [21-22], la méthode d’espace de parité [23] et la méthode d’estimation paramétriques [17]. Les méthodes de diagnostic à base de modèles qualitatifs permettent d’abstraire le comportement du procédé avec un certain degré d’abstraction à travers des modèles de type symbolique (non mathématique) décrivant l’espace d’état continu du système d’une manière qualitative [24]. Les méthodes qualitatives peuvent être classifiées selon le niveau d’abstraction considéré du système à diagnostiquer, tels que les systèmes continus [25], les systèmes à événements discrets [26] ou les systèmes hybrides dynamiques.La séparation entre les méthodes quantitatives et les méthodes qualitatives n’implique pas que ces deux aspects sont disjoints parce qu’en réalité, ces deux types de méthode peuvent coexister au sein d’une même stratégie de diagnostic. Figure I.10 Principe des méthodes de diagnostic à base de modèles.

Méthodes de diagnostic sans modèles

Dans certaines applications industrielles, il est difficile ou voire impossible de générer des modèles physiques représentatifs du fonctionnement d’un système et de ses différents composants à cause de la complexité accrue du système à diagnostiquer. Généralement, ces méthodes de diagnostic exploitent les informations issues des capteurs installés au niveau de la machine sans avoir à utiliser le modèle mathématique simulant le comportement du système. Parmi les stratégies de diagnostic sans modèles, on distingue les techniques de l’intelligence artificielle, telles que les systèmes experts [29] et les méthodes de la reconnaissance des formes [30]. Nos travaux de ladite thèse se focalisent sur le diagnostic de défauts affectant les roulements des moteurs asynchrones, où les techniques d’IA sont les outils adéquats pour effectuer cette tâche en exploitant les informations générées à l’aide des capteurs sans la nécessité d’effectuer une modélisation qui est difficile à élaborer dans ce cas complexe. Le processus de diagnostic s’effectue selon plusieurs étapes : l’acquisition de données, l’extraction et la sélection des indicateurs pertinents qui seront ensuite pris comme une entrée d’un classifieur afin d’identifier et localiser les défauts. Les différentes étapes permettant le développement de cette approche de diagnostic sont détaillées dans les sections suivantes. 

Table des matières

Chapitre I : Introduction aux machines tournantes, principales défaillances, et techniques de surveillance
I.1. Introduction
I.2. Politiques et objectifs de la maintenance
I.3. Principales défaillances des machines tournante
I.3.1 Défauts de roulement
I.3.2 Défauts d’engrenage
I.3.3 Le balourd
I.3.4 Défauts d’alignement
I.4. Classification des méthodes pour l’élaboration d’un système de diagnostic industriel
I.4.1 Méthodes de diagnostic à base de modèles
I.4.2 Méthodes de diagnostic sans modèles
I.5. Chaines d’acquisition et sources d’information
I.5.1 L’analyse vibratoire
I.5.2 L’analyse de lubrifiant
I.5.3 L’émission acoustique
I.5.4 Thermographie
I.6. Outils de traitement du signal vibratoire adaptés pour la recherche de défauts
I.6.1 Indicateurs statistiques
I.6.2 Analyse spectrale
I.6.3 Analyse d’enveloppe
I.6.4 Analyse temps-fréquence
I.6.4.1 Transformée de Fourier à Court Terme (STFT)
I.6.4.2 Transformée en Ondelettes (WT)
I.6.4.3 Méthodes de décomposition adaptative
I.6.4.3.1 Transformée en Ondelettes Empiriques (EWT)
I.6.4.3.2 Décomposition en Modes Variationnels (VMD)
I.6.4.3.3 Décomposition en Modes Empiriques (EMD)
I.7. Etat de l’art
I.8. Conclusion
Chapitre II : Diagnostic basé sur les méthodes de l’intelligence artificielle
II.1 Introduction à l’intelligence artificielle
II.2 Stratégie d’un diagnostic intelligent de défauts
II.2.1 Extraction d’indicateurs de défauts
II.2.2 Sélection et transformation d’indicateurs pour la réduction de dimensionnalité
II.2.2.1 Approche 01 : sélection d’indicateurs
II.2.2.2 Approche 02: transformation d’indicateurs
II.2.3 Classification de défauts
II.2.3.1 Apprentissage statistique conventionnel
II.2.3.1.1 Machine à Vecteurs de Support (SVM)
II.2.3.1.2 Réseau de Neurones Artificiels (ANN)
II.2.3.1.3 Autres méthodes d’apprentissage conventionnel
II.2.3.2 Apprentissage profond (DL)
II.2.3.2.1 Réseaux de neurones à convolution (CNN)
II.2.3.2.2 Autres méthodes d’apprentissage profond
II.3 Conclusion
Chapitre III : Application au diagnostic des défauts de roulements
III.1 Introduction
III.2 Banc d’essai de « CWRU »
III.3 Partie 01 : Diagnostic des défauts à base du traitement EEMD à l’aide des méthodes
conventionnelles d’apprentissage automatique
III.3.1 Traitement de données
III.3.2 Analyse par décomposition modale empirique d’ensemble « EEMD »
III.3.3 La méthodologie de diagnostic proposée
III.3.4 Sélection d’IMF
III.3.5 Application de la méthode proposée sur la base de données de CWRU
III.3.5.1 Extraction d’indicateurs statistiques et classification de défaut
III.3.5.2 Evaluation de performance sous la même condition de charge et de vitesse
III.3.5.3 Evaluation de performance sous conditions de charge et de vitesse variables
III.4 Partie 02 : Diagnostic des défauts à base de l’apprentissage profond
III.4.1 Traitement de données
III.4.2 Méthodologie de diagnostic proposée
III.4.2.1 L’architecture proposée du modèle CNN
III.4.2.2 Evaluation de performance sous la même condition de charge et de vitesse
III.4.2.3 Evaluation de performance sous conditions de charge et de vitesse variables
III.4.2.4 Evaluation de performance sous conditions de bruit
III.5 Conclusion
Chapitre IV : Application de la méthode EEMD-CNN pour le diagnostic des défauts de roulements
IV.1 Introduction
IV.2 Banc d’essai URMA/CRTI
IV.3 Diagnostic des défauts de roulements par la méthode proposée
IV.3.1 Traitement de données
IV.3.2 La reconstruction des signaux vibratoires à base d’application d’EEMD
IV.3.3 Extraction des caractéristiques et classification des défauts
IV.3.3.1 La première méthode: EEMD-MCSVM
IV.3.3.2 La deuxième méthode:EEMD-2DCNN
IV.3.3.3 Évaluation de performance sous la même condition de vitesse
IV.3.3.4 Évaluation de performance sous des conditions de vitesses variables
IV.3.3.5 Évaluation sous différents quantités de données apprentissage/test
IV.3.4 Validation de la méthode proposée sur la base de données de CWRU
IV.4 Conclusion

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