Design conceptuel d’une recherche

DESIGN CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE

Nous avons veillé à ce que notre stratégie d’accès au terrain et le dispositif méthodologique que nous avons déployés soient compatibles avec notre question de recherche et avec nos choix épistémologiques. En effet, cette cohérence conditionne la légitimité et la validité de tout projet scientifique (Royer et Zarlowski, 2003). C’est pourquoi, davantage que des positions de principe, cette quête de cohérence a guidé notre recherche. Ce qui nous intéressait ici était la manière dont les acteurs créaient du sens à partir de leurs situations de travail, des difficultés qu’ils rencontraient et de leurs capacités à les résoudre afin de pouvoir agir. L’objet de recherche commun à nos trois cas était le processus par lequel les acteurs construisaient ce sens et le rôle de l’éthique dans ce processus. Au départ, la question de recherche était la suivante : quel rôle joue l’éthique dans le processus qui permet à des acteurs organisationnels de continuer l’action en cours ou de reprendre l’action interrompue ? Quel est le processus qui permet à des salariés de rester dans des services confrontés à des problématiques d’attractivité et de fidélisation, de risques psycho-sociaux ou juridiques ? Nous avons donc cherché à effectuer nos choix méthodologiques en cohérence avec notre question de recherche et notre posture épistémologique. C’est pourquoi, nous avons placé notre recherche dans un cadre post-positiviste et plus particulièrement dans celui du réalisme critique transcendantal (RCT). Nous avons opté pour une méthodologie qualitative qui a su montrer au cours du temps sa capacité à être significative de la réalité organisationnelle (Lincoln et Guba, 2000), et plus particulièrement par l’étude de trois cas (Tsoukas, 1989 ; Yin, 2014). Notre méthodologie s’inspire largement de la théorie ancrée, telle qu’exposée par Corbin et Strauss (2015), et transposée en sciences de gestion par Gioia (Gioia et al., 2012). Elle repose sur un raisonnement abductif qui consiste en un va-et-vient entre théorie et terrain, entre catégories empiriques et concepts.

Dans un premier temps, nous allons expliquer pourquoi nous positionnons ce travail dans un paradigme post-positiviste et plus précisément dans celui du réalisme critique transcendantal (1). Puis, dans un second temps, nous présenterons la méthodologie qualitative que nous avons déployée (2). Pour Piaget (1967), l’épistémologie est l’étude de la constitution des connaissances valables. Elle se distingue de la méthodologie qui n’en est qu’un aspect (étude des méthodes destinées à élaborer des connaissances). Elle nous invite à définir un paradigme, c’est-à-dire « une constellation de croyances, valeurs, techniques, etc. partagées par une communauté donnée » (Kuhn, 1962). L’exigence d’un questionnement épistémologique en sciences de gestion comme dans n’importe quelle autre science semble incontournable (Weick, 1989). Elle permet au chercheur de légitimer sa recherche sur le phénomène étudié (Wacheux et Roussel, 2005) ainsi que d’exposer les postulats implicites de cette dernière. Le souci de sortir du débat entre positivisme et constructivisme a guidé notre choix du paradigme épistémologique dans lequel s’inscrit cette recherche. En effet, il nous semblait important de dépasser ce clivage, pour au moins deux raisons. La première raison tient à la spécificité des sciences de gestion et de son projet pragmatique. La seconde raison tient à la distinction que nous souhaitions opérer, entre la question épistémologique et la question de la construction de l’objet de recherche. Ainsi, notre travail s’inscrit dans une épistémologie positiviste, à laquelle nous apportons, cependant, quelques aménagements (Miles et Huberman, 1991 ; 2003), en raison de la spécificité des sciences de gestion (1.1). En outre, nous distinguons la question de l’inscription dans un cadre épistémologique de celle de la construction de l’objet de recherche (1.2). C’est pourquoi, finalement, nous avons opté pour le paradigme du réalisme critique transcendantal (RCT) qui, bien que non stabilisé, nous permet de sortir du débat positivisme/constructivisme (1.3). Nous plaçons notre recherche dans un cadre positiviste car elle a l’ambition de mettre en évidence des régularités exportables à d’autres recherches. Ainsi, notre recherche tente de mettre en évidence des régularités avec « l’idée que la science [est] une description vraie du monde » (Koenig, 1993). En ce sens, elle est positiviste. De plus, nous pensons que le réel existe, en partie, indépendamment et antérieurement à la pensée. C’est pourquoi, nous nous démarquons du constructivisme sur le plan épistémologique.

 

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