Modèle acoustique global et synthèse sonore du bruit d’un véhicule : application aux véhicules ferroviaires

Le bruit d’un véhicule ferroviaire

En milieu extérieur, le bruit d’un train est composé d’un certain nombre de sources acoustiques pouvant être regroupées en fonction des phénomènes physiques qui sont à leur origine. Ainsi, on décompte sur un matériel tel qu’un train régional AGC (Autorail Grande Capacité) , pouvant fonctionner en mode de traction diesel ou électrique (le train qui nous servira de support dans toute cette étude) quatre groupes de sources de bruit :
le roulement, source dominante dès 30km/h pour les trains à traction diesel et en deçà pour les trains à traction électrique. Sa contribution s’étend sur l’ensemble du spectre (de 100Hz à 8000Hz);
les auxiliaires de traction (groupe électrogène, moteur diesel et son échappement, moteur électrique, groupes de ventilation, convertisseur électrique ou encore groupe de climatisation). Les contributions de ces sources sont en général importantes pour de faibles vitesses de circulation (en dessous de 50km/h), et caractérisées par de forts niveaux dans les basses fréquences (en-dessous de 1000Hz) ;
les sources aérodynamiques dues à la perturbation des écoulements dans des zones localisées comme la zone des bogies (au niveau des roues et de leur carénage), la zone du pantographe ou les persiennes de prise d’air sur les motrices. La contribution de ces sources devient significative pour des vitesses de circulation élevées (au-delà de 200km/h) ; elle est équivalente en terme de puissance rayonnée à celle du roulement pour des vitesses autour de 350km/h, cf [Talotte et al., 2003]. Etant données les vitesses de circulation en jeu dans notre étude (nous sommes dans le cadre de circulations urbaines, soit entre 0 et 100km/h), les sources aérodynamiques ne sont pas caractéristiques et leur étude ne sera pas menée plus avant ;
le dernier groupe de sources englobe toutes les sources temporellement émergentes : elles sont susceptibles d’apparaître durant le passage mais ne sont pas inhérentes au fonctionnement du train. Il s’agit par exemple du bruit de crissement au freinage ou du bruit de crissement en courbe. Leurs contributions sont en général caractérisées par de très forts niveaux acoustiques (pouvant atteindre 120dB(A)) portés par quelques fréquences.

Le bruit des auxiliaires de traction

Le terme “auxiliaires de traction” réunit l’ensemble des composants assurant la traction électrique ou/et diesel du train. Un train à motorisation diesel et traction électrique (comme celui sur lequel est basée notre étude) comporte :
un moteur diesel. Dans le cas d’un train à motorisation diesel et traction électrique, ce moteur diesel alimente une génératrice électrique, elle-même reliée au moteur électrique de traction. Ce groupe électrogène, est enfermé dans un compartiment refroidi par le biais d’un ventilateur ; une prise d’air sur le côté de la caisse vient alimenter le moteur diesel ;
un système de refroidissement du moteur diesel composé de ventilateurs axiaux,  soufflant sur des échangeurs air/eau, alimentés par un moteur électrique ou hydraulique selon le train ; un moteur de traction électrique et son système de refroidissement composé de un ou plusieurs ventilateurs; un convertisseur électrique et son système de ventilation (ventilateur axial). Ces auxiliaires sont des sources acoustiques caractéristiques du bruit ferroviaire pour de faibles vitesses : le moteur diesel produit un bruit composé de trois contributions : le bruit de combustion, le bruit d’injecteur et le bourdonnement dû à l’acyclisme des roues d’entrainement. Ces bruits sont essentiellement basses fréquences, à fortes composantes tonales. En plus du bruit produit par le moteur diesel, dans le cas de l’AGC, viennent s’ajouter les contributions de la génératrice électrique et du ventilateur du compartiment. Sur l’AGC, le groupe électrogène est encapsulé en bas de caisse, derrière des jupes permettant de l’isoler acoustiquement. Pour réduire encore davantage le bruit de cet auxiliaire, une grande partie du compartiment est recouvert de matériau isolant. Différentes voies de transfert peuvent être distinguées comme les panneaux de carénage du groupe électrogène, la prise d’air moteur ou la grille apposée devant le ventilateur du compartiment ; l’échappement s’apparente acoustiquement à un conduit long qui va filtrer le bruit produit par le moteur diesel ;
le bruit du moteur électrique de traction se décompose en deux sources de bruit principales : le bruit de ventilation et le bruit magnétique. Le bruit de ventilation s’apparente directement à un bruit de ventilateur . Le bruit magnétique a deux composantes principales : un bruit indépendant du régime et un bruit évoluant avec le régime. Le bruit magnétique constant résulte des forces et vibrations générées par l’interaction de l’onde de flux magnétique fondamentale avec les parties en rotation du rotor. Le bruit dépendant du régime est généré lorsque le courant passe dans les induits du rotor, sous augmentation de régime. Le courant ´électrique dans les induits produit des champs magnétiques autour des induits qui créent une force statique sur les dents du stator. Ces forces radiales et tangentielles appliquées au stator produisent des vibrations et du bruit. Le bruit du moteur de traction électrique n’est pas une source dominante ; les systèmes de refroidissement (du groupe électrogène, du moteur de traction, du système de climatisation ou du convertisseur électrique) s’apparentent acoustiquement à la somme du bruit du/des ventilateur(s) et du bruit du moteur les alimentant (qu’il soit électrique ou hydraulique). Les ventilateurs, axiaux pour la plupart, peuvent être encaissés dans des conduits courts ou longs.

Méthodes de caractérisation à poste fixe

Mesure de spectres et de niveaux sonores : Le protocole ISO 3095 préconise un ensemble de microphones distants de 7,5m de la voie, entourant si possible le véhicule (la motrice). Les microphones doivent être espacés les uns des autres de 3 à 5m et placés à une hauteur de 1,2m. Si des sources importantes sont présentes en toiture, une deuxième hauteur de microphone est préconisée à 3,5m d’altitude.
Tous les auxiliaires pouvant fonctionner lorsque le train est à l’arrêt, doivent être en fonctionnement durant l’essai. Plusieurs régimes de ventilateurs ou de moteur peuvent être caractérisés, en prenant soin de séparer les phases d’accélération de régime des phases à régime constant. Les hauteurs de sources sont identifiées par la position physique des sources ou par des mesures supplémentaires.
Mesures des directivités : Au cours du projet Harmonoise , Zhang a répertorié les méthodes de caractérisation de la directivité des sources, cf [Zhang et Jonasson, 2006] :
pour une source que l’on peut entourer complètement par un réseau de microphones, ce sont des mesures hémisphériques qui sont préconisées, réalisées selon la norme ISO 3744 portant sur la caractérisation de la puissance d’une source à partir de la mesure du champ de pression émis; pour des sources non enveloppables (étendues), l’intensimétrie sur la source au passage est préconisée et réalisée selon la norme ISO 9674- 2 :
la directivité verticale est déterminée à l’aide de microphones placés à différentes hauteurs, la directivité horizontale à l’aide des mesures au passage.
Ces méthodes de caractérisation des directivités supposent que la distance source/récepteur assure la validité du modèle de source ponctuelle et que l’on connaisse la position de la source équivalente ponctuelle.

Méthodes de caractérisation pour un train en mouvement

Mesure de spectre et de niveau global : Dans le cas d’un véhicule au passage, à vitesse constante, la norme ISO 3095 préconise l’utilisation de deux microphones à 7,5m du droit de la voie, placés à des hauteurs de 1,2m et 3,5m au-dessus de la surface supérieure des rails. Les signaux enregistrés par ces microphones permettent de calculer la signature du passage (évolution du niveau de pression exprimé en dB au cours du temps) et le niveau de pression équivalent temps de passage pondéré A LpAeq,T p.
Mesures et traitements d’antennes : L’antennerie acoustique est un système de mesure mettant en jeu un ensemble de microphones disposés suivant une géométrie donnée, et dont les signaux de sortie sont acquis simultanément. Le traitement d’antenne consiste à effectuer un filtrage spatial des signaux reçus sur les capteurs afin de séparer au mieux les différentes composantes du champ sonore.
On dispose de la mesure synchrone des signaux de pression sur les N capteurs de l’antenne acoustique. Il s’agit alors d’introduire un modèle de propagation acoustique entre les points du milieu de propagation où la/les sources sont recherchées et chacun des N capteurs de l’antenne. Ce modèle de propagation est appelé signal réplique (ou opérateur de propagation). La comparaison des signaux mesurés et des signaux répliques créés pour chaque point du milieu de propagation permet d’identifier les sources acoustiques émettant dans le milieu. Il s’agit de définir cette notion de comparaison et de la formaliser mathématiquement : c’est le traitement d’antenne.

Table des matières

Introduction 
1 Etat de l’art 
1.1 Sources de bruit ferroviaires 
1.1.1 Le bruit d’un véhicule ferroviaire
1.1.2 Le bruit de roulement
1.1.3 Le bruit des auxiliaires de traction
1.1.4 Bilan sur l’état de l’art des sources ferroviaires
1.2 Méthodes de caractérisation expérimentales des sources de bruit dans le domaine ferroviaire
1.2.1 Méthodes de caractérisation à poste fixe
1.2.2 Méthodes de caractérisation pour un train en mouvement
1.3 Méthodes de synthèse – Outils de synthèse 
1.3.1 Outils développés à la SNCF
1.4 Bilan 
2 Conception de l’outil de synthèse VAMPPASS 
2.1 Objectifs de l’outil de synthèse et modèle de source 
2.1.1 Modèle de sources équivalentes
2.2 Méthode de synthèse 
2.2.1 Méthode additive – Vocodeur de phase
2.2.2 Application à l’outil VAMPPASS
2.3 Entrées du logiciel 
2.3.1 Sources acoustiques
2.3.2 Scénario de passage – Loi d’évolution des sources
2.4 Bilan 
3 Caractérisation des sources 
3.1 Introduction 
3.2 Description des mesures 
3.2.1 Mesures au passage par deux microphones – Campagne A
3.2.2 Mesures d’antenne 2D au passage – Campagne B
3.2.3 Mesures par une antenne verticale de microphones à faibles vitesses – Campagne C
3.3 Contenu spectral – Séparation des contributions tonales et large bande
3.3.1 Contenu spectral
3.3.2 Séparation des contributions tonales et large bande
3.4 Caractérisation des composantes tonales 
3.4.1 Introduction
3.4.2 Identification à des sources typiques
3.4.3 Avec une voie de mesure – une hauteur de microphones
3.4.4 Diffraction du rayonnement par l’environnement de la source
3.4.5 Avec un réseau de microphones
3.5 Caractérisation du bruit large bande 
3.5.1 Localisation, niveau et contenu spectral
3.5.2 Mesures dédiées à la séparation des contributions large bande – Campagne D
3.6 Bilan
4 Le bruit de roulement 
4.1 Caractérisations expérimentales 
4.1.1 Mesurer le bruit de roulement
4.1.2 Mesurer les paramètres qui pilotent le bruit de roulement
4.2 Utilisation du logiciel TWINS 
4.2.1 Principes du logiciel TWINS
4.2.2 Modèles de la dynamique des sous-structures roue-rail-traverses
4.2.3 Interaction roue/rail – Modèle de contact
4.2.4 Modèles de rayonnement des sous-structures
4.2.5 Validation de TWINS
4.2.6 Obtention des paramètres d’entrée de TWINS
4.2.7 Caractérisation expérimentale du bruit de roulement à 80km/h
4.2.8 Comparaison mesures / simulations TWINS – Etude paramétrique
4.2.9 Caractérisation du bruit de roulement à 30km/h
4.3 Bilan
5 Validation et exemple d’utilisation de VAMPPASS 
5.1 Validation des indicateurs classiques
5.2 Validation perceptive
5.3 Exemple d’utilisation du logiciel 
Conclusion et perspectives 
Bibliographie 
A Description des sources de bruit sur un AGC Bombardier 
B Formalisme des harmoniques sphériques 
B.1 Rappels sur les fonctions de Bessel, Neumann, Hankel et Legendre
B.1.1 Fonctions de Bessel, Neumann et Hankel
B.1.2 Fonctions de Legendre
C Méthodes de minimisation 
C.1 Méthode du simplex de Nelder Mead
C.2 Méthode de descente du gradient
D Indicateurs acoustiques 
D.1 Lpeq,T p ou LpAeq,T p
D.2 SEL et TEL
D.3 L(A)max
D.4 LdB et LdB(A)
D.5 Signature du passage
E B-Format 
E.1 microphone ambisonic et B-Format
F Outils de la validation perceptive 
F.1 Tests de dissemblance
F.2 Analyse multidimensionnelle
F.2.1 Création d’une distance
F.2.2 Facteur de stress
F.2.3 Construction de l’espace multidimensionnel
F.3 Analyse en composante principale
G Echantillons sonores – CD de démonstration

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