Réflexions sur les facteurs d’évolution du monde agricole

Réflexions sur les facteurs d’évolution du monde agricole

Introduction

Pour comprendre les mécanismes qui régissent l’agencement spatial de l’agriculture et qui créent de telles différences d’évolution entre les territoires, il faut s’interroger sur la manière dont l’espace agricole se modifie. Les différentes actions publiques menées au cours du siècle dernier en matière de restructuration de l’activité ont amené les agriculteurs à revoir leurs pratiques et à s’orienter vers certaines productions plutôt que vers d’autres. Ces mutations structurelles ont eu d’importantes répercussions sur l’agencement spatial de l’activité et sur la manière de gérer le parcellaire agricole. L’organisation et la dynamique de l’agriculture dépendent à la fois des données stables du milieu naturel (climat, relief…) et des évolutions technologiques, scientifiques et sociales qui permettent de lever partiellement les contraintes ou de mettre en valeur les potentialités des milieux. Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale en France, l’évolution de l’agriculture dépend de plus en plus des marchés, des filières de transformation et de l’industrie agro-alimentaire. Mais elle obéit avant tout à la définition de politiques spécifiques qui fixent de grandes orientations, déclinées ensuite dans l’espace en fonction des situations (naturelles, socioéconomiques) locales. La politique intervient à deux niveaux : l’Europe, qui fixe les axes généraux et le niveau national qui module les mesures de la politique européenne. En cinquante ans, la vision de la politique agricole, qu’elle soit européenne ou nationale, a beaucoup évolué. On passe d’une agriculture productiviste, qui cherche à maximiser la production sans réellement se soucier des impacts sur le milieu naturel et le territoire, à une agriculture multifonctionnelle qui intègre d’autres fonctions de l’agriculture que celle de production de denrées alimentaires et dans laquelle les problématiques environnementales et sociales sont de plus en plus prises en compte. L’identification du processus de mutation est complexe, il s’effectue à plusieurs échelles et dans des dynamiques variées. Les relations et les interactions spatio-temporelles entre les composantes du système « agriculture » sont difficiles à étudier de manière séparée.

Représentation schématique des facteurs de transformation de l’espace agricole

Pour débuter l’analyse de l’évolution du monde agricole, nous proposons tout d’abord de s’interroger sur l’espace agricole et ses facteurs de mutation.

L’espace agricole à différentes échelles spatiales

L’espace agricole peut être analysé à différentes échelles spatiales (figure 2). Il sera alors étudié de manière distincte selon que l’on se situe à une échelle macro (monde) ou micro (parcelle agricole). Les indicateurs d’analyse seront donc de diverses natures. Prenons plusieurs exemples : – A petite échelle comme celle du monde, ce seront surtout les orientations agricoles qui sont corrélées principalement aux zones bioclimatiques (agriculture tropicale, tempérée…) et les grands échanges de production qui en découlent, qui sont principalement analysés ; – A une échelle micro comme celle de l’exploitation agricole, c’est son fonctionnement et ses pratiques qui sont essentiellement étudiés.  Cet emboîtement spatial implique nécessairement des liens de dépendance entre chaque niveau d’échelle et que, même si l’on se situe au niveau de la parcelle, il est nécessaire de faire référence à des échelles plus petites. L’exemple que nous développerons plus loin est celui de l’influence de la Politique Agricole Commune (échelle européenne) sur les systèmes de production et leur orientation (échelle de l’exploitation agricole). Les éléments en action sont différents d’un niveau d’échelle à l’autre mais implicitement liés. Les changements spatiaux qui en résultent sont donc ressentis de manière plus ou moins forte dans l’organisation de chaque niveau spatial. 

Un modèle de transformation spatiale de l’agriculture : le modèle de Von Thünen

Le modèle de Von Thünen (figure 3) ne présente pas en soi les facteurs de transformation de l’espace agricole mais il y fait implicitement référence. En effet, c’est un modèle économique de localisation des productions agricoles selon la rente foncière. Il considère l’agriculteur comme un homo oeconomicus parfait. Au départ, un seul facteur, la distance à la ville-marché, influe sur l’organisation spatiale des productions agricoles (anneaux concentriques). Quand on intègre d’autres facteurs (infrastructure de transport, inégalité dans la fertilité des sols, ville secondaire et sa région), l’espace agricole se transforme et les productions se répartissent autrement en ayant toujours pour objectif une maximisation de la rente foncière.

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